Nemanja Radulovic, la nouvelle Rock Star du violon

Nemanja Radulovic est sans doute aujourd’hui l’un des violonistes les plus singuliers de la scène classique. Né en 1985, il s’impose non seulement par une technique redoutable, mais aussi par une image atypique, entre cuir noir, cheveux longs à la Paganini et tatouages apparents. Une "Rock Star du violon" ? L’étiquette amuse, mais elle reflète bien son désir de dépoussiérer l’univers classique. Cette démarche n’est pas sans rappeler celle de Nigel Kennedy, violoniste britannique qui, dès la fin des années 1980, s’affichait en kilt et baskets, et dont l’enregistrement des Quatre Saisons de Vivaldi (1989) fut un immense succès commercial. À l’instar de Nigel Kennedy, Nemanja Radulovic conjugue look percutant et virtuosité assumée. Son interprétation des Quatre Saisons, donnée avec son ensemble" Double Sens", électrise le public. Les tempi sont fulgurants, les contrastes saisissants, les effets expressifs marqués. Il introduit des ornementations libres, des phrasés pleins de rubato, jusqu’à évoquer l’improvisation. Le violon imite tour à tour les orages, les chants d’oiseaux ou les cris du vent, dans une esthétique presque cinématographique. Le tout oscille entre baroque et rock, pour une lecture audacieuse qui séduit une large audience tout en divisant les puristes. La seconde partie du concert est consacrée à Jean-Sébastien Bach, dans un esprit plus sobre. Radulovic y montre un autre visage : celui d’un interprète subtil, raffiné, respectueux de la ligne et de l’architecture. Sa version de la " Sicilienne" émeut jusqu’aux larmes. Le public, conquis, l’acclame avec ferveur. En guise de bis, Radulovic enchaîne quelques "tubes" du violon : la "Czardas" de Monti, des airs tziganes, des chansons françaises revisitées… Pour l’occasion, il troque son cuir noir contre une élégante veste blanche, signe d’un artiste caméléon, aussi à l’aise dans l’extravagance que dans la sobriété.